Récit du naufrage du Chasseur 8, le 13 juillet 1942,
par l'officier de liaison britannique Edward Walton.
Les informations concernant Edward Walton m'ont été fournies par son fils Michael.
Le document relatant le naufrage, m'a été fourni par Léon Simon de l'Ile de Wight ainsi
que par Michael Walton.
Le texte original du rapport peut être trouvé ci-dessous :
un site rendant hommage à E. Walton
1- Présentation d'Edward Walton (par Michael Walton)
Edward Walton à l'époque des évènements (colorisée)
Edward Philip Patrick D'Arcy Walton, de son nom complet, est né le 12 février 1914. Avant la guerre, il était
avocat en exercice
Before the war he was a practising lawyer (a qualified solicitor).
(un avocat qualifié) travaillant dans le conseil juridique.
Il s'est porté volontaire pour servir dans la marine le samedi 2 septembre 1939
et donc un jour avant que la guerre ne soit déclarée.
Ses états de service montrent qu'il a été affecté au HMS Royal Arthur le 27 septembre 1939 - c'était un camp de vacances
Butlins
Butlin's est une chaîne de grandes stations balnéaires au Royaume-Uni (Wikipédia)
qui a été transformé en un centre d'entraînement pour la Royal Navy près de Skegness dans le
Lincolnshire. La seule preuve de sa participation à cette formation était un menu de dîner d'adieu et
de nombreuses photos datées du 11 mars 1940. Il y est désigné comme simple matelot et formé comme télégraphiste.
Je pense que le stage de formation n'a duré qu'une semaine, ou deux, au cours de laquelle ils ont reçu
leur uniforme. Donc, jusqu'à cette date, je suppose que, comme beaucoup de volontaires,
il a attendu chez lui avant d'être affecté.
Après le Royal Arthur, il devient membre de l'équipage du HMS Birmingham du 4 avril 1940 au 26 juin 1940 en tant
que télégraphiste. Après cela, il a suivi une formation d'officier RNVR sur le HMS King Alfred
(un autre roi médiéval!). Cette base terrestre était à Hove dans le Sussex. Le cours a duré 10 semaines.
Il fut finalement affecté à East Cowes en tant qu'officier de liaison avec la marine française libre
le 19 avril 1941. Il fut basé à Marvin's Yard de cette date jusqu'au 10 avril 1945, date à laquelle
il partit pour servir comme avocat auprès des tribunaux navals du nord-ouest de l'Europe - impliqué dans
la discipline des troupes britanniques avançant dans le nord-ouest de l'Europe.
Je me souviens
qu'il nous avait dit qu'il était basé à Bruxelles et Anvers en Belgique et Minden en Allemagne.
Il a été relevé de cette affectation le 29 novembre 1945 et finalement démobilisé
le 26 janvier 1946. Lui, ma mère et moi avons déménagé dans le nord-ouest de Norfolk où
il a exercé comme avocat ayant deux autres enfants plus tard. Il est décédé le 27 septembre 1978.
Il a été comme vous le savez le seul survivant du Chasseur 8, une expérience qui je pense, l'a suivi toute
sa vie bien qu'il en ait très peu parlé. Je ne pense pas qu'il soit sorti en mer pour des
patrouilles après cela, bien qu'il
soit indiqué dans certains de ses rapports qu'il devait servir sur le Chasseur 12 après une pause. Je ne trouve
aucune trace de sorties en mer pour patrouiller en 1943 ou 1944. Il semble avoir été presque entièrement
basé à terre à Marvin's Yard.
Michael Walton.
2- Compte rendu du naufrage du chasseur 8 par l'officier de liaison britannique Edward Walton.
Sinking of French Chasseur 8, narrative of British Liaison Officer
Le RNVR Edward Walton (photo Michael Walton - colorisée)
J’espère que vous m’excuserez si je fais un compte-rendu informel de la perte du chasseur 8, je suis alité et n’ai pas
d’installation pour faire un rapport en bonne et due forme.
A peu près à 19:04 le 13 juillet furent repérés, sur le travers babord, 2 chasseurs monomoteurs à environ 3 miles et venant
directement sur nous. Des ordres furent donnés aux hommes en veille sur le pont de se tenir près de leurs armes. Les avions
n’étaient pas reconnus comme hostiles et l’on ne sonna pas le branle-bas de combat.
A environ 1000 yards (900 mètres), les avions qui s’étaient approchés à 200 pieds (60 mètres) prirent soudainement de l’altitude pour créer l’impression qu’ils étaient amicaux, qu’ils nous avaient juste vus et qu’ils s’en allaient. La visibilité n’était que de 5 miles (9 kilomètres). Ils replongèrent immédiatement tout droit vers nous. Le commandant donna l’ordre d’ouvrir le feu. Nous ouvrîmes le feu et presqu’au même moment les avions ouvrirent le feu avec leurs mitrailleuses.
Je pouvais entendre les balles frapper le navire et je vis des balles traçantes toucher le pont de la timonerie. Le commandant et moi nous tenions sur la passerelle. Le premier maître Guillemet , je crois, prit en charge ou se tint à proximité de la mitrailleuse. Il était de veille mais transféra la responsabilité du navire au Commandant dès le feu ouvert. Le feu était si intense que je me rappele seulement que je regardais le Commandant au cas où il aurait eu besoin d’aide, pensant que les avions visaient haut, probablement la timonerie. Après une seconde ou deux il y eu une explosion à l’arrière. J’ai clairement vu l’explosion, les flammes faisaient 16 pieds de haut (près de 5 mètres) et je crois que la bombe qui causa les explosions tomba dans le mess des Quartier-Maîtres. L'explosion n'a pas réduit en miettes le navire et je n'ai pas senti non plus de choc en timonerie. Cependant, immédiatement après l'explosion, le navire se coupa en deux juste à l'avant de la cheminée. En moins de 5 secondes, j'avais de l'eau jusqu'à la taille et on me tira par ma ceinture de sauvetage sur le pont. La proue se souleva et j'échappais de justesse à la masse de la passerelle qui me tombait dessus. Je passai par-dessus bord côté tribord et le Commandant à bâbord d'où il rejoignit le dinghy qui flottait là. Le navire coula presque avant que je me sois dégagé, c'est à dire 5 secondes avant l'explosion. Il était évident que personne dans le poste d’équipage n'avait pu s'échapper. En fait, je pense que personne en dessous des ponts ne pouvait s'être échappé. Ensuite, les avions sont revenus immédiatement, très bas et à une vitesse lente. A ma surprise, ils n'ont pas mitraillé les survivants mais nous ont survolés puis ont pris la direction du sud, sans avoir apparemment été endommagés par nos tirs.
La mer était agitée. Les vagues avaient une hauteur de 5 à 6 pieds (entre 1,5m et 2m) avec de temps en temps des vagues qui déferlaient. Je pouvais voir environ 8 personnes à 50 mètres de moi dans l'eau, quelques-unes visiblement blessées et qui criaient. Je n'ai reconnu personne car tous étaient recouverts d'huile, pourtant j'ai cru voir le télégraphiste anglais Ryan. J'avais trouvé une épave provenant du navire et pensant que cela pourrait aider un blessé, je nageai avec. Le courant était trop fort pour nager mais à la fin, je vis le Commandant dans le dinghy qui coulait (l'embarcation avait été gravement endommagée) et je réussis à aller vers lui et à le prendre sur mon morceau d’épave. Il avait passé un sale quart d'heure et apparemment, il avait passé un bout de temps dans l'eau. Les autres hommes avaient entre temps dérivé et ne furent plus revus.
Le Commandant et moi restèrent sur le morceau d’épave qui nous maintenait le haut du corps, mais qui pouvait facilement se retourner. Le matin nous entendîmes le bruit d'un moteur, que nous pensions être celui d'un bateau. J’envoyai un SOS et autres signaux avec mon sifflet et nous criâmes.
Rien ne se passa. Vers 8 heures, le Commandant fut pris de délire et perdit conscience à peu près une heure après. En posant mon bras autour de lui, ce fut assez facile de le maintenir à flot. La visibilité était mauvaise et on ne pouvait voir aucune terre. Il n'y avait ni bateaux ni avions. J'essayais en vain de redonner vie a Commandant et je ne savais pas s'il était mort ou seulement inconscient. Vers 11.00 une vague nous submergea et il coula. J'ai essayé de le retrouver mais je n'ai pas pu car il a coulé si rapidement. Il avait une ceinture et moi, une combinaison de survie qui m' empêchait de plonger. Après plusieurs tentatives pour attirer les avions, je fus recueilli par un MGB à 14.00. J'étais à 6 miles du naufrage du navire.
La vitesse du navire au moment de l'attaque était de 10 noeuds. Le navire n'a pas dévié de son cap pendant l'attaque. Aucun signal MAYDAY n'a été lancé car le temps de s'apercevoir que l'avion était hostile, le temps a manqué.
Je m'excuse du caractère personnel de ce rapport mais les choses sont arrivées si rapidement que je n'ai pu avoir qu'un sentiment personnel de ce qui est arrivé.
Lieutenant Walton, RNVR(réserviste de la Royal Navy et engagé volontaire)
Du quartier des malades de la Royal Navy.
voir aussi à la date du 13 juillet 42 :
britanniques du Chasseur 8 Rennes
Les deux britanniques, qui ont péri lors du naufrage, étaient le télégraphiste Bert K.Payne et le signalman Arthur M. Ryan.
On retrouve sur ce site, outre les documents originaux, la liste des marins qui ont péri à cette occasion.
3- Perte du Chasseur 5 le 21 décembre 1943
Les membres britanniques du Chasseur 5 étaient :
Alan B. Cave Signalman, Sydney H. Goodall telegraphist, Fraser J. Haslam Ty/Sub Lieutenant RNVR
Lien vers les membres britanniques du Chasseur 5 Carentan
Une liste des marins français qui ont péri lors de ce naufrage :
Liste